des vendanges 2024 très disparates : nos vignerons nous racontent

des vendanges 2024 très disparates : nos vignerons nous racontent
Roussane & Viognier domaine des long Axel Glesser - Brié et Angonnes - Isère 38

La vendange 2024 restera gravée dans les mémoires des vignerons que nous suivons comme l'une des plus complexes et imprévisibles de ces dernières années. Entre aléas climatiques, maladies de la vigne et défis de vinification, le millésime s'annonce comme un véritable parcours du combattant pour les producteurs. Plongeons au cœur de cette récolte atypique qui promet des vins aux profils aussi variés que les difficultés rencontrées par ceux qui les façonnent : nos vignerons nous racontent.

Par Domaine de la Biodynamie Le : 02-10-2024

Le contexte viticole de cette année 2024

Le gel : impacte sur la quantité de la vendange

L'année 2024 a débuté sous de sombres auspices pour de nombreux vignobles français. Des épisodes de gel tardif au printemps ont frappé de plein fouet plusieurs régions viticoles, anéantissant une partie significative des bourgeons naissants. Ce phénomène climatique a eu un impact considérable sur la quantité de raisins disponibles pour la vendange, réduisant drastiquement les rendements dans certains secteurs.

Les vignerons ont dû redoubler d'efforts pour protéger leurs vignes, utilisant des techniques variées allant des bougies anti-gel aux hélicoptères pour brasser l'air. Malgré ces mesures, de nombreux domaines ont vu leur production potentielle amputée de 20 à 50%, voire plus dans les cas les plus sévères. Cette réduction quantitative pourrait paradoxalement conduire à une concentration qualitative pour certains cépages, à condition que les autres facteurs climatiques s'alignent favorablement.

Trop de pluie avec son lot de maladie

Après le gel, c'est un excès de précipitations qui est venu perturber le cycle végétatif de la vigne. Les pluies abondantes ont créé des conditions idéales pour le développement de maladies fongiques, mettant à rude épreuve la vigilance et la réactivité des viticulteurs. Le mildiou et l'oïdium ont proliféré, nécessitant des interventions importantes dans les vignes pour sauver ce qu'il restait. Même les cépages dit « résistant » ont été impactés.

Cette humidité excessive a également favorisé une croissance végétative importante, obligeant les vignerons à intensifier les travaux en vert pour maintenir un bon équilibre entre feuillage et grappes. La gestion foliaire est devenue un enjeu crucial pour assurer une maturation optimale des raisins et limiter les risques sanitaires. Les domaines en agriculture biologique et biodynamique ont été particulièrement mis à l'épreuve, devant redoubler d'ingéniosité pour protéger leurs vignes sans recourir aux intrants de synthèse.

La grêle qui met à mal la vigne

Comme si le gel et les pluies ne suffisaient pas, des épisodes de grêle violents ont frappé plusieurs vignobles français au cours de l'été. Ces intempéries ont causé des dégâts considérables, lacérant les feuilles et blessant les grappes. Dans certains secteurs, des parcelles entières ont été dévastées en quelques minutes, anéantissant le travail de toute une année.

Les conséquences de la grêle sont multiples : outre la perte immédiate de récolte, les blessures infligées aux ceps peuvent compromettre la qualité des raisins restants et fragiliser la vigne pour les saisons à venir. Les vignerons touchés ont redoublé de vigilance dans leur suivi sanitaire et adaptés leurs pratiques de vinification pour tirer le meilleur parti des raisins rescapés.

Stress hydrique dans certaines régions : peut de jus

Paradoxalement, malgré les pluies excessives du printemps, certaines régions viticoles comme les Pyrénées ont connu des périodes de sécheresse intense durant l'été. Ce stress hydrique a eu des répercussions significatives sur le développement des baies, conduisant à des grappes moins juteuses mais plus concentrées. Si cette situation peut s'avérer bénéfique pour certains cépages en favorisant la concentration aromatique, elle pose des défis en termes de rendement et d'équilibre des vins. La vigne souffre également car elle n'a pas la matière nécessaire pour faire ses réserves afin d'assurer sa pérennité. Des vignerons constatent que même de vieux ceps ne survivront pas à cette période et que le mal est fait.

Les vignerons présent sur Domaine de la Biodynamie nous remontent des infos pour cette vendanges 2024

Bordeaux : critique & demi teinte

Dans le prestigieux vignoble bordelais, l'ambiance est mitigée. Les châteaux renommés de la région rapportent une année particulièrement éprouvante, marquée par des conditions météorologiques extrêmes. Le gel printanier a touché de manière inégale les différentes appellations, certains secteurs ayant perdu jusqu'à 40% de leur récolte potentielle dès le débourrement.

Les pluies estivales ont ensuite favorisé le développement du mildiou, obligeant les viticulteurs à une vigilance de tous les instants. Malgré ces défis, certains domaines en biodynamie ont réussi à tirer leur épingle du jeu, grâce à un travail acharné dans les vignes et une gestion minutieuse de la canopée. Les premiers retours sur les vendanges évoquent des rendements en baisse mais une qualité prometteuse pour les parcelles ayant échappé aux aléas climatiques, avec des Cabernets Sauvignons particulièrement expressifs.

Savoie - Ain et Isère : pas mal et demi teinte

Les vignobles alpins offrent un tableau contrasté pour cette vendange 2024. En Savoie, les vignerons rapportent une année globalement satisfaisante, malgré quelques épisodes de gel localisés. Les cépages autochtones comme la Mondeuse et la Jacquère semblent avoir bien résisté aux caprices du climat, promettant des vins à la fraîcheur caractéristique de la région.

Dans l'Ain et l'Isère, la situation est plus nuancée. Certains domaines ont souffert d'orages violents en début d'été, causant des dégâts importants sur les jeunes grappes. Cependant, la fin de saison plus clémente a permis une maturation lente et régulière des raisins rescapés. Les vignerons en biodynamie soulignent l'importance cruciale du travail du sol et de la gestion du couvert végétal cette année, qui ont contribué à maintenir un bon état sanitaire des vignes malgré les conditions difficiles.

Languedoc-Roussillon : en demi teinte

Le vaste vignoble du Languedoc-Roussillon présente une mosaïque de situations pour ce millésime 2024. Les zones côtières ont généralement mieux résisté aux aléas climatiques, bénéficiant de l'influence modératrice de la Méditerranée. En revanche, les secteurs plus continentaux ont dû faire face à des épisodes de canicule intense, provoquant des phénomènes d'échaudage sur certaines parcelles.

Les vignerons nous rapportent que les rendements sont en baisse, mais se montrent optimistes quant à la qualité des raisins récoltés. Les cépages méditerranéens comme le Grenache et la Syrah semblent avoir particulièrement bien résisté aux conditions extrêmes, promettant des vins concentrés et expressifs. Toutefois, la vigilance reste de mise lors des vinifications, car les déséquilibres entre maturité phénolique et alcoolique pourraient poser des défis techniques.

Cotes de Provence : pas mal

Les vignobles de Provence tirent leur épingle du jeu dans ce millésime complexe. Malgré quelques épisodes orageux au printemps, la région a bénéficié d'un été globalement favorable, avec des températures élevées mais sans excès. Les vignerons en biodynamie comme le Domaine Kennel, soulignent l'importance du mistral qui a joué un rôle crucial dans le maintien d'un bon état sanitaire des vignes, limitant naturellement la pression des maladies fongiques.

Les premiers retours sur les vendanges sont encourageants, avec des raisins présentant un bel équilibre entre fraîcheur et maturité. Les cépages emblématiques de la région comme le Cinsault et le Grenache promettent des rosés aromatiques et structurés. Certains domaines rapportent même une année exceptionnelle pour leurs cuvées rouges, avec des Mourvèdres particulièrement expressifs grâce à l'arrière-saison chaude et sèche.

Touraine : on a sauvé la récolte

En Touraine, les vignerons ont dû faire preuve d'une résilience exceptionnelle face aux caprices de la météo comme nous le remonte le Domaine de l'Aumonier. Le début de saison a été marqué par des gelées tardives qui ont touché de manière inégale le vignoble, causant des pertes significatives dans certains secteurs. Cependant, grâce à une mobilisation sans précédent et à l'utilisation de techniques innovantes de protection contre le gel, de nombreux domaines ont réussi à sauver une partie substantielle de leur récolte.

L'été pluvieux a ensuite mis à rude épreuve la patience et le savoir-faire des vignerons en biodynamie. La gestion du feuillage et les travaux en vert ont été cruciaux pour maintenir un bon état sanitaire des vignes. Les premiers retours sur les vendanges évoquent des rendements en baisse mais une qualité surprenante, notamment pour les Sauvignons blancs qui semblent avoir tiré parti des conditions fraîches pour développer des profils aromatiques complexes et élégants.

Le travail au chai ne va pas être de tout repos

Des vendanges sous la pluie

Les conditions météorologiques capricieuses de 2024 ont persisté jusqu'aux vendanges, obligeant de nombreux vignerons à récolter sous la pluie. Cette situation a considérablement compliqué la logistique des vendanges, nécessitant une réactivité accrue et une adaptation constante des plannings de récolte. Les équipes de vendangeurs ont dû redoubler d'attention pour sélectionner les grappes, éliminant celles touchées par la pourriture ou diluées par l'excès d'eau.

Des maturités phénoliques pas optimales

L'un des principaux défis de ce millésime 2024 réside dans le décalage fréquent entre maturité technologique et maturité phénolique des raisins. Les conditions climatiques erratiques ont perturbé le cycle normal de maturation, conduisant à des situations où le taux de sucre est élevé alors que les tanins et les composés aromatiques ne sont pas pleinement développés. Cette dissonance de maturité pose des problèmes complexes.

Pour pallier ce déséquilibre, certains vignerons optent pour des vendanges précoces afin de préserver la fraîcheur et l'acidité, quitte à travailler avec des degrés potentiels plus bas. D'autres choisissent d'attendre une maturité phénolique plus avancée, au risque d'obtenir des vins plus alcoolisés. Les techniques de vinification doivent être adaptées au cas par cas, avec une attention particulière portée aux extractions pour éviter les tanins verts ou astringents. L'utilisation de la macération préfermentaire à froid est fréquemment rapportée comme moyen d'améliorer l'extraction aromatique sans surextraire les tanins immatures.

Impact des maladies et parasites sur la qualité de la vendange

La pression sanitaire exceptionnelle de cette année 2024 a laissé des traces sur la qualité de la vendange. Malgré les efforts acharnés des vignerons, certaines parcelles ont été touchées par le mildiou, l'oïdium et donc par la pourriture grise. Ces attaques fongiques ont non seulement réduit les volumes récoltés mais ont également affecté la qualité intrinsèque des raisins.

Au chai, il faut redoubler de vigilance lors du tri des raisins. L'utilisation de tables de tri optiques s'est généralisée dans de nombreux domaines pour éliminer les baies altérées. Les protocoles de vinification sont adaptés pour tenir compte de l'état sanitaire des raisins, avec parfois des ajustements dans les doses de sulfites. La maîtrise des températures de fermentation devient cruciale pour éviter tout développement de goûts indésirables liés aux contaminations fongiques.

Les vinifications en mode nature c'est plus compliquées

Pour les adeptes de la vinification naturelle, ce millésime 2024 s'annonce comme un véritable défi technique et philosophique. L'état sanitaire parfois précaire des raisins et les déséquilibres de maturité compliquent considérablement la tâche des vignerons souhaitant travailler sans intrants. La gestion des fermentations spontanées devient particulièrement délicate, avec des risques accrus de déviations organoleptiques ou d'arrêts de fermentation.

Certains vignerons « nature » rapportent avoir dû faire des compromis cette année, en utilisant par exemple de faibles doses de sulfites ou de carboglass au pressurage pour sécuriser les oxydations.